SYNOPSIS :
Logen Neuf-Doigts n'a plus qu'une seule bataille à livrer : celle qui l'opposera à Bethod, le roi du Nord. Vaincre son pire ennemi lui apportera-t-il enfin la paix à laquelle il aspire ?
Après avoir fait l'amère expérience de la guerre, Jezal dan Luthar a tourné le dos à la vie militaire pour couler des jours heureux avec sa promise. Cependant, le prestige et les honneurs ont la vilaine habitude de se rappeler au bon souvenir d'un homme au moment où il s'y attend le moins...
Et tandis que le roi de l'Union n'en finit plus d'agoniser, les paysans se révoltent et les nobles complotent. Bayaz a un plan pour sauver le monde, comme toujours, mais il comporte des risques. Le premier des Mages est-il prêt à briser la Première Loi ?
CRITIQUE :
"Le diable sait-il qu'il est un diable ? "
Tout ne s'est pas passé comme l'avait savamment orchestré Bayaz, et c'est ainsi que la communauté a été dissoute après avoir échouée dans sa quête de l'arme ultime.
À l'instar de Logen qui reprend le chemin du nord afin de régler ses comptes avec Bethod, et Jézal qui entend bien éprouver ses sentiments à ceux d'Ardee, chacun des anciens compagnons de voyage semble retrouver le contrôle de sa destinée... en apparence tout du moins.
Alors qu'au nord la guerre s'enlise et immobilise les armées de l'Union, c'est le moment que choisit l'empereur du Gurkhul pour lancer son invasion. Mené par les "cent verbes", les disciples-dévoreurs de Khalul, des dizaines de milliers de soldats s’apprêtent à débarquer et embraser le continent désormais sans défenses.
Ce troisième et dernier tome de la première loi clos de la plus belle des manières une histoire qui se sera révélée brillante, haletante et déroutante par ses faux-semblants. C'est un récit sanglant, barbare nous proposant des épisodes martiaux savoureux comme la défense désespérée d'une forteresse en ruine par Renifleur et ses compagnons d'armes durant sept longues journées, ou bien le duel rituel que se livre Logen "le sanguinaire" et Fenris "le redoutable" dans une véritable danse de la mort rappelant deux titans des anciens temps.
"Dernière querelle" livre finalement les dessous d'une intrigue complexe où Joe Abercrombie aura ramené l'humain au centre de sa dramaturgie en proposant des personnages fouillés, profond et cruellement réaliste, des personnages qui vivent l'histoire dans une incertitude la plus totale.
La conclusion de cette trilogie nous amène aussi à porter un regard différent sur les deux premiers volumes, le tout constituant un ensemble très cohérent et justifiant des certaines longueurs rencontrées ici ou là.
Le final est monumental, chaotique, certaines choses vont changer dans le monde de la première loi et d'autres vont rester immuables car encrées dans la nature...humaine.
Les enjeux du roman reposent bien au-delà d'une simple caricature du bien contre le mal, ces deux notions perdant habilement de leurs stéréotypes à mesure que toutes les pièces du puzzle s'assemblent pour représenter une fresque où les hommes opposent ces valeurs habilement afin de mieux défendre leurs intérêts personnels.
"Chasse le naturel, il revient au galop", Joe Abercrombie développe l'idée que les événements que nous vivons ne nous changent pas, si parfois nous pouvons nous perdre ils nous révèlent à nous-mêmes, et si les personnages évoluent au fil des pages, il n'en n'oublie pas de nous rappeler aussi qu'en chacun de nous réside une nature profonde à laquelle on ne peut échapper et que parfois faire le bien signifie s'opposer à un mal par un plus grand mal encore.
Si bien souvent dans la littérature fantasy un héros est caractérisé par son altruisme et son sens de la justice, l'auteur abat ces clichés pour développer une vision plus large, les actes héroïques découlant assez souvent d'une mise en abyme des personnages qui développent ces vertus alors qu'ils sont confrontés à l'absence de choix, en d'autres termes quand ils sont dos au gouffre.
Cette première trilogie ouvre des perspectives scénaristiques plus qu'elle ne conclut un simple cycle. Elle n'offre pas véritablement de happy end tant pour certains personnages l'auteur à fait preuve une nouvelle fois d'un profond cynisme, mais installe un cadre géopolitique où pourront évoluer les prochains opus se déroulant dans le même univers.
À ce titre, Servir froid propose moult personnages étant apparus dans la première loi et nécessite la lecture de cette trilogie pour en savourer tous les ressorts et autres implications de la conclusion de cette saga.
La première Loi est donc un excellente trilogie qui rompt avec un certain standard de la fantasy dans sa forme, tout en en proposant une histoire vive et intense dans un univers fouillé et passionnant. La vrai force du récit réside sans aucun doute dans ses personnages ultra charismatiques, qui pour une grande partie retourneront à la boue avant l'épilogue, et ce style d’écriture offrant un plaisir de lecture similaire aux romans de David Gemmell. Pas étonnant d'ailleurs que Joe Abercrombie participe au recueil à venir en hommage à cet auteur.
Une affaire à suivre avec le plus grand intérêt donc ...